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Épargne

Avec l’un des taux d’épargne les plus élevés d’Europe, les Français cherchent à donner du sens à leur argent. L’investissement socialement responsable (ISR) permet d’allier performance économique et impact environnemental ou social, en intégrant les critères ESG dans les choix d’épargne. Ce mode d’investissement, en plein essor, traduit une volonté croissante de concilier rentabilité et durabilité.

Au sommaire

Le choix de la finance responsable pour donner sens à son épargne

Avec un des taux d’épargne les plus élevés de la zone euro, les Français et l’épargne entretiennent une relation privilégiée. L’investissement socialement responsable (ISR) se présente alors comme une gamme de produits qui valorise les caractéristiques environnementales et sociales. Tout en intégrant les performances économiques, l’ISR intègre ainsi les critères extra-financiers pour s’inscrire dans les principes du développement durable. L’ISR peut alors se comprendre comme une épargne engagée, responsable et vertueuse.

La prise en compte des critères liés à l’environnement, au social et à la gouvernance, aussi appelés critères ESG, offre à l’épargnant la possibilité de donner sens à son placement. Ceux-ci s’articulent autour de trois axes, à savoir :

  • Critères Environnementaux : Prise en compte de la réduction de l’empreinte carbone, de la consommation d’énergies fossiles, du respect de la biodiversité, de la gestion des ressources dont l’eau et les déchets, …
  • Critères Sociaux : Prise en compte du respect du droit du travail, de la diversité et de l’inclusion au sein des entreprises, de la prévention des accidents du travail, …
  • Critères de Gouvernance : Prise en compte de la parité du conseil d’administration et de son indépendance, de la transparence sur la rémunération des dirigeants, …

Selon une étude d’Ipsos pour le FIR publiée en septembre 2025, 55 % des épargnants accordent une place importante aux impacts environnementaux et sociaux dans leurs décisions de placements. Avec une hausse progressive des investissements dans des fonds responsables, les études convergent autour de l’intérêt croissant des Français pour l’épargne responsable, bien que ces produits qui restent marginaux bénéficieraient de davantage d’information à leur sujet.

Il apparaît toutefois que l’ISR se heurte à une vague anti-ESG, en étant accusé d’étau idéologique source de contraintes. Depuis le retour de Donald Trump à la Maison blanche, les Etats-Unis se mettent progressivement en retrait de leurs engagements internationaux sur ces thématiques, et les institutions financières remettent en cause les principes de gestion du risque financier liés au climat. Les acteurs européens du secteur s’opposent à cet argument selon lequel le réchauffement climatique n’a pas d’effet systémique sur le système financier en affirmant qu’une finance durable permet d’être plus souverain et résilient.

Les support et stratégies de placement ISR

Les placements ISR sont réalisables, dans leur majorité, à travers les supports d’épargne classique, à savoir :

  • L’assurance-vie
  • Le Plan d’Épargne en Actions (PEA)
  • Le compte-titres ordinaire (CTO)
  • Le Plan d’Épargne Retraite (PER)
  • L’épargne salariale

Le législateur encourage également le développement de la finance responsable. La création du plan d’épargne avenir climat (PEAC) pour les moins de 21 ans par la loi industrie verte de 2023 s’inscrit dans cette dynamique d’incitation au financement de la transition écologique.


En parallèle, les sommes placées sur ces supports sont dirigées vers des fonds sélectionnés selon les stratégies ISR des gestionnaires (cumulables), dont les principales sont :

  • L’approche « best in class » : sélectionner les entreprises les mieux notées dans chaque secteur en termes de critères ESG, sans politique d’exclusion (ex : les « meilleurs élèves » de l’industrie de l’énergie).
  • L’exclusion (sectorielle ou normative) : exclure les entreprises et secteurs ne répondant pas à des critères ESG minimaux ou ne respectant pas des normes internationales (ex : le secteur du tabac).
  • L’engagement actionnarial : influencer les entreprises par l’exercice du droit des actionnaires (ex : le vote en assemblée générale) et par le dialogue actionnarial, afin d’améliorer leurs pratiques ESG.
  • L’approche thématique : investir uniquement dans les secteurs liés au développement durable (ex : la santé).
  • L’« impact investing » : aligner l’objectif d’impact environnemental et social avec la perspective de rendement financier (ex : les entreprises de lutte contre le gaspillage).

La performance des fonds ISR

La performance des fonds ISR en comparaison aux fonds classiques est naturellement questionnée. Si la doxa suggère une sous-performance de l’ISR, les études convergent vers l’idée que l’ISR présente une performance égale voire supérieure, notamment à long terme.

En ce sens, l’étude MSCI (2025) relative à l’effet des politiques d’exclusion sur la performance des produits réfute le présupposé selon lequel l’exclusion de titres de l’univers d’investissement affaiblirait la performance du produit, au motif d’une moindre diversification du portefeuille. D’après ces mêmes indicateurs, les exclusions limitées et ciblées permettraient d’exprimer les préférences extra-financières des investisseurs sans nuire à la performance, voire en l’améliorant. De manière analogue, le FIR a publié une étude dans laquelle, en moyenne, 62 % des fonds ISR surperforment le marché.

La communication est surveillée par les autorités de contrôle

Les instances de régulation financières veillent à l’information « claire, exacte et non trompeuse » du client. L’Autorité des marchés financiers (AMF) en 2020 puis en 2024, et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) en 2022 ont respectivement dressé une liste de recommandations sur la promotion de caractéristiques extra-financières. Visant à lutter contre le greenwashing et à renforcer la transparence, celles-ci insistent notamment sur :

  • La vérification des arguments commerciaux : ils doivent reposer sur des éléments objectifs et précis, afin d’éviter toute présentation trompeuse, notamment concernant la portée de l’investissement en matière de durabilité.
  • La clarification de la terminologie ainsi que celle des arguments, spécifiquement au sujet de la labellisation ISR et de la proportion de supports de l’offre concernée par les critères extra-financiers.
  • L’équilibre de la communication sur les caractéristiques extra-financières pour les supports en unités de compte en gestion libre. Leur évocation est justifiée si au moins 80 % d’entre eux relèvent de l’article 9 du SFDR, ou si au moins 75 % relèvent de l’article 9 et le reste du solde de l’article 8.
  • L’accès facilité aux informations relatives au règlement SFDR.
  • La considération du risque de greenwashing et la mise en œuvre de procédures de contrôles adéquates.
  • La publication de la démarche et de la méthode adoptées pour la prise en compte de critères extra-financiers dans la gestion, ainsi que des modalités d’une potentielle politique d’engagement actionnarial.
  • L’adhésion à une charte, code ou label à ce sujet.

Les labels et référentiels ISR

En parallèle, un ensemble d’indicateurs permettent de simplifier et guider les choix d’investissement. Afin de promouvoir la finance durable et de lutter contre les pratiques de greenwashing, les labels et la taxinomie européenne œuvrent pour renforcer la transparence des performances extra-financières.

Les labels certifient les fonds en fonction du degré d’engagement sur les aspects socio-environnementaux :

  • Label d’Etat ISR : Introduit en 2016 par le ministère de l’Economie et des Finances, le label ISR est l’un des plus connus par son aspect généraliste. Il vise à concilier la performance économique ainsi que l’impact social et environnemental. La certification impose de justifier de la qualité des engagements sur au moins deux indicateurs ESG parmi le critère environnemental, social, de gouvernance et de respect des droits de l’homme. Des audits annuels garantissent le respect des engagements, et l’adoption d’un nouveau référentiel en 2024 a permis de renforcer les exigences de sorte à désormais exclure certains secteurs tels que les énergies fossiles.
  • Label d’Etat Greenfin : Créé par le ministère de la Transition écologique en 2015 lors de la COP21, ce label est spécialisé sur l’investissement vert. Il vise à contribuer à l’économie bas-carbone et à financer la transition écologique à travers des critères d’exclusion, de secteurs d’éco-activités, de prise en compte des critères ESG et d’impact positif sur la transition.

Au-delà de ces deux principaux labels, Relance, LuxFlag (au Luxembourg), ou encore Towards Sustainability (en Belgique) peuvent être cités. Chacun diffère en termes d’exigence et de spécialisation.

En complément des labels, la taxonomie désigne un règlement européen qui classifie les activités économiques et les produits financiers durables. Pour plus de transparence, le règlement européen SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation) de 2019 structure les fonds en trois catégories :

  • Article 6 : Les fonds n’ont pas d’objet de durabilité explicite. Ils ne sont donc pas soumis à des exigences particulières concernant leur durabilité.
  • Article 8 : Les fonds ont un objectif de durabilité. Ils ont une obligation de transparence sur leur politique d’investissement durable et la prise en compte des critères ESG dans la sélection des investissements. En revanche, ils ne sont pas soumis à des critères de durabilité contraignants.
  • Article 9 : Les fonds à vocation durable. Ils sont soumis à des critères contraignants et à des objectifs clairs. Ils doivent aussi fournir des informations détaillées sur leur politique d’investissement durable et la prise en compte des critères ESG dans la sélection.

Ce règlement SFDR est complété depuis 2024 par la directive du CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) visant à mieux harmoniser les obligations d’informations extra-financières des entreprises (ex : émissions, inclusion et diversité…) afin de permettre aux investisseurs d’identifier les entreprises vertueuses. Il apparaît néanmoins que cette directive est en cours de révision afin de simplifier la procédure, tout en assurant la crédibilité du report des critères ESG.

Les acteurs de référence pour l’ISR

L’univers de l’épargne dans le segment ISR concentre de nombreux acteurs. Ceux-ci peuvent être classés par catégorie :

  • Les investisseurs : particuliers ou professionnels (banques, investisseurs institutionnels…) qui disposent de sommes à épargner qu’ils délèguent afin de les sécuriser et les faire fructifier dans le temps.
  • Les intermédiaires : conseillent et proposent des produits ISR aux particuliers dans le cadre de leurs offres de produits financiers (ex : Préfon, banques privées).
  • Les pouvoirs publics et institutions financières : Régulent et contrôlent l’activité financière pour promouvoir l’investissement responsable et garantir la conformité avec les exigences en termes de durabilité (ex : Autorité des marchés financiers (AMF), Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)…).
  • Les sociétés de gestion : Habilitées par l’Autorité des marchés financiers, les sociétés sont mandatées par les investisseurs pour gérer leur épargne, conformément à la stratégie d’investissent souhaitée par le mandant (ex : Ofi Invest Asset Management, Ecofi…).
  • Les « labellisateurs » et agences de notation extra-financière : les premiers garantissent la transparence et qualité des engagements des fonds ISR, tandis que les seconds évaluent les performances ESG des entreprises à destination des investisseurs (ex : comité de label ISR et Vigeo).
  • Les organismes du réseau ISR : Promeuvent l’investissement ISR et favorisent la coopération entre les différents acteurs à l’occasion de rencontres entre les chercheurs, investisseurs, pouvoirs publics et entreprises. Par exemple, le Forum pour l’investissement responsable (FIR) organise la semaine de l’investissement responsable ; l’Association Française de Gestion financière (AFG) représente les professionnels de gestion financière…

Bon à savoir

Différencier la finance responsable et la finance solidaire :

La finance solidaire, la finance responsable et la finance verte composent le secteur de la finance durable, qui a l’ambition d’agir pour la collectivité à moyen-long terme.

Toutefois, tandis que les fonds ISR visent à concilier les critères ESG avec des perspectives de rentabilité financière, les fonds solidaires investissement dans l’économie sociale et solidaire (ESS). Privilégiant la logique d’impact fort, d’utilité et de cohésion sociale (ex : lutte contre le chômage, développement de l’agriculture biologique…) la finance solidaire génère ainsi des performances financières plus limitées.

(1) FIR et l’École Polytechnique, Label ISR, 2020

(2) FIR et l’Ifop, Les Français et la finance responsable, septembre 2025